Dominicales du 18 mai 2025
La méconnaissance de la réalité carcérale et des conséquences d’une incarcération peut conduire à considérer la prison comme étant la réponse à l‘insécurité. La réalité est toute autre, pour bien des raisons :
Les conditions de détention sont telles qu’un certain nombre de personnes détenues développent en prison des troubles psychiques. Pour d’autres, ces troubles s’y aggravent. Récemment, un détenu en a tué un autre à la prison de Bois d’Arcy. Il n’avait jamais agressé personne jusque-là. C’est en détention qu’il est devenu un meurtrier. Il en sortira plus dangereux qu’il n’y est entré.
A l’origine des délits ou crimes qui ont été commis, se trouve souvent une addiction (à la drogue, à l’alcool, au jeu, au sexe …). Seule une sortie de la dépendance permettrait de tourner une page. Mais elle est très difficile dans ce lieu où les tensions sont vives et où la violence n’est jamais bien loin.
D’autres se livrent à de petits trafics et la menace d’une peine de prison ne les dissuade pas de recommencer. Ils sont récidivistes, voire multi récidivistes. La détention est vécue par eux comme « un accident du travail ». Ils l’intègrent dans leur parcours.
La détention a aussi de lourdes conséquences pour les proches : le conjoint, les enfants, les parents âgés et parfois à charge, l’apprenti qui, en perdant son patron, voit compromise sa formation …
Son coût social est important. La détention conduit à la paupérisation. A la perte de revenu, s’ajoutent les frais d’avocat, le remboursement des parties civiles. Il devient difficile de payer le loyer, les études des enfants, de rembourser l’emprunt contracté pour acheter un appartement. Le risque suicidaire est réel, notamment dans les premiers mois (choc carcéral) et à l’approche de la sortie. Les liens familiaux et amicaux se distendent, entraînant des séparations, des ruptures. Avec cette question angoissante : Sur qui pourrai-je compter à ma sortie de prison ?
Ce n’est donc pas en incarcérant à tout va que l’on construira une société apaisée. Il devient urgent de développer des peines alternatives, comme cela se fait depuis longtemps en Allemagne, en Italie, en Espagne … Mais sommes-nous capables, en France, d’avoir une réflexion dépassionnée sur ce sujet ? C’est toute la question …
Père Olivier Dupont